Je m’appelle Anne, j’ai deux enfants et suis illustratrice depuis 2013. Mon sujet de prédilection est la parentalité, la famille. Je rêve depuis mes débuts de pouvoir un jour dessiner ma propre bande dessinée. J’ai attendu et mûri ce projet des années, et j’ai profité de ce temps pour peaufiner mon trait et me nourrir du travail d’autres auteurs de BD. Depuis des années, des parents ayant perdu un enfant me sollicitent pour dessiner leur famille au complet. C’est-à-dire en faisant apparaitre leur petit enfant perdu. C’est très important pour eux d’avoir enfin cette représentation de leur famille qu’ils n’avaient jamais pu avoir sous forme de photographie. A force de les côtoyer, de les lire, de les dessiner, j’ai été fortement sensibilisée par eux au sujet du deuil périnatal et au tabou qui l’entoure. Afin leur rendre hommage et pour contribuer à lever ce tabou, j’ai décidé que ma première bande dessinée serait dédiée à ce thème.
« Il n’y a aucun mot dans le dictionnaire pour désigner ces parents »
Même si, petit à petit, la sensibilisation fait son œuvre, il y a encore du travail. En plus de vivre l’immense douleur de perdre un enfant, ces parents doivent supporter un fardeau supplémentaire : un silence pesant, et des comportements maladroits, voire indifférents. Saviez-vous qu’il n’y a toujours aucun mot dans le dictionnaire pour désigner ces parents ? Ils ont besoin de reconnaissance, de compréhension. Ils ont besoin que nous sachions ce qu’il faut dire et ne pas dire lorsqu’ils traversent cette douloureuse épreuve. Egalement, ils ont besoin que nous sachions les épauler pour qu’ils puissent faire leur deuil.
La fiction que j’ai écrite a été en partie inspirée de l’histoire de mes propres parents qui ont en effet perdu ma petite sœur au 8ème mois de grossesse lorsque j’avais 8 ans. Mais elle est surtout totalement inspirée par tous les nombreux témoignages des paranges (parents d’ange) qu’ils m’ont confiés toutes ces années. Même si mon livre s’adresse plutôt aux adultes, il est tout à fait possible de le mettre entre les mains des enfants. Car c’est une façon de pouvoir aborder ce sujet en famille, et une façon de sensibiliser dès le plus jeune âge.
« C’est une ode à la vie, l’espoir, à la résilience »
Ma bande dessinée ne traite pas uniquement du sujet du deuil périnatal. J’avais envie d’évoquer d’autres grands thèmes. Privés de leur bébé, les personnages décident donc d’adopter un enfant différent, atteint du syndrome de Down (trisomie 21). C’est un choix que j’ai fait de ne pas rentrer dans un schéma « classique » d’une nouvelle grossesse. Car ce n’est pas possible pour tout le monde. Certains parents ne parviennent pas à pouvoir avoir une nouvelle grossesse après avoir perdu un ou plusieurs bébés. Par l’adoption, j’ai souhaité montrer une autre façon de fonder une famille. Par le syndrome de Down, je souhaitais pouvoir donner une place au handicap car c’est un autre sujet qui me touche beaucoup et que j’ai envie de soutenir. D’autre part, j’ai connu dans ma vie plusieurs familles ayant fait ce choix assez incroyable, et j’avais été admirative comme émerveillée par leur histoire. J’avais très envie de la retranscrire. Si mon livre commence dans la tristesse et la douleur, il termine dans un rayon de soleil. C’est une ode à la vie, à l’espoir, à la résilience.
Ma bande dessinée a pour objectif d’aider à faire du deuil périnatal un sujet de société. Le deuil périnatal ne concerne pas seulement les bébés morts in-utero mais également les bébés qui décèdent à leur naissance, quelques heures/jours/semaines après. En bref, cela concerne énormément de personnes, on connait tous quelqu’un qui a traversé cela, que l’on soit au courant ou non. Nous devrions tous être sensibilisés à ce sujet pour ne plus faire peser le fardeau du silence sur ces parents qui souffrent.
Ma BD est à mettre dans les mains des parents endeuillés, mais surtout dans les mains de ceux qui ne le sont pas !
L’or du soir qui tombe – Parents d’une étoile, publié chez les éditions Ailes et Graines
Vous pouvez également découvrir le travail de Korig’Anne sur son site korriganne.com, ou la suivre sur Facebook et Instagram.
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