Gynécologues-obstétriciens en grève : pourquoi ?

Ce lundi, vous avez peut-­être voulu consulter votre gynéco-­obstétricien, votre pédiatre ou votre médecin généraliste, voire même sage-­femme et là, vlan… cabinet fermé. En grève contre la Loi Santé. Avant de pester contre cette consultation avortée, si on essayait de comprendre un peu ce qui se passe ?

Parce que la médecine libérale peut disparaître

Avec la Loi Santé, il y a un grand risque de voir s’instaurer une médecine salariée, dans des maisons de santé, comme cela se pratique en Angleterre, au Canada, etc… Quid de la liberté du patient de choisir son praticien de santé ? Or, on sait bien que, enceinte, on a surtout besoin de se sentir en confiance avec la sage-­femme libérale qu’on choisit pour nous suivre et nous préparer à la naissance, ou avec son gynécologue-­obstétricien. On a aussi envie de choisir le praticien à qui on confiera la santé de bébé les yeux fermés. On pourra toujours consulter ailleurs, mais sans prise en charge. Et ça, on n’en aura pas tous les moyens.

Parce que le risque du financement de la santé par les complémentaires est réel

L’obligation pour les entreprises de proposer une mutuelle à leurs salariés est-­elle juste une mesure de justice sociale ou la préfiguration du financement de la santé en France dans quelques années ? Pour faire face aux besoins de financement, les mutuelles n’ont pas d’autre choix que d’augmenter le montant des cotisations ou de réduire le panel des soins pris en charge puisqu’elles ne peuvent pas fonctionner sur le principe du déficit. Or, enceinte ou jeunes parents, on sait bien qu’on ne peut pas toujours différer les soins. A quel coût, demain ?

Parce que le secret médical est menacé

Un médecin est tenu au secret médical et l’assurance maladie aussi. Mais les complémentaires santé ? On peut imaginer sans trop forcer le trait de la paranoïa qu’il puisse exister des passerelles entre la complémentaire santé et le groupe d’assurances auquel elle est rattachée. Et le bébé qui a connu des problèmes de santé dans son enfance risque, 30 ans plus tard, de se voir accorder un prêt sous condition d’une assurance exorbitante en raison de son dossier médical.

Idem si vous avez été suivie pour un diabète gestationnel par exemple, qui peut parfois préfigurer un diabète de type 2 dans les dix ans à venir : la mutuelle peut donc tenir compte d’un risque de santé avéré et majorer les conditions de cotisation à la complémentaire santé. Prudence d’ailleurs avec les applications santé : si vous devez renseigner un profil médical, levez le pied ! Vérifiez que ces données ne seront pas en open data… Les praticiens de santé, de plus en plus sollicités pour utiliser eux­-mêmes les avancées de la médecine connectée, s’inquiètent du respect du secret médical et du risque de recoupement des données en vue de l’identification du patient par des organismes non médicaux et non autorisés.


Parce que le tiers payant généralisé va leur compliquer la vie

Oui, certes, mais pas que… Ce point est relativement mineur parce qu’il existe une parade qui s’appelle le déconventionnement. Et basta. Les vraies raisons de la grève sont ailleurs, comme vu plus haut. Mais on peut se demander si c’est si normal que ça de payer moins cher une consultation spécialisée qui va peut-­être nous éviter des complications à l’accouchement (ou sauver la vie de notre bébé) qu’une séance chez le coiffeur (ndlr, 70 euros, coupe et couleur en moyenne) ? S’il est normal qu’une sage-femme, après cinq années d’études dont la difficile sélection PACES (ndlr, première année commune aux études de santé), soit moins bien rémunérée que la majorité des professionnels à bac+3 dont le quotidien ne consiste pas à dépister des soucis de santé chez les femmes enceintes et leurs nouveau-­nés, et à assurer des gardes nuit, week­ends et jours fériés ? Alors oui, les professionnels de santé râlent, font grève, ça nous a peut­-être embêté aujourd’hui et sans doute demain si le mouvement perdure, ou encore le 16 novembre prochain avec la grande manif nationale des médecins à Paris, mais, bon, c’est comme les piqûres, c’est pour notre bien.

 

 


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